Petit à petit mon entreprise prospère*.
Les chéries** bossent de mieux en mieux, et leur compagnie me coûte de moins en moins.
Alors je continue. Dans la compréhension du fonctionnement de ces sociétés étranges. Dans la tentative de les maîtriser. Au printemps, j’ai appris les techniques d’élevage de reines. Pour aller plus loin qu’un simple renouvellement de cheptel par division de ruches, qui soumet la génétique de mes chéries aux aléas de la nature.
Dans ce level là, la génétique est contrôlée. Les abeilles sont toujours bien douces, peu essaimeuses, et surtout productives. Finis les affres de la recherche de la reine, de son entretien, la terreur de la tuer par mégarde. On en produit des nouvelles, toutes belles, et la logique pousse même à éliminer entre deux doigts celles qui sont un peu vieilles, qui risquent de moins produire la saison prochaine.
Ah, productivisme , quand tu nous tiens..
Non contents de favoriser honteusement une espèce d’abeilles, l’apis mellifera, parmi les quelques 2000 espèces d’abeilles sauvages existantes, en leur assurant gratis gîte , soins et couvert en cas de maladie ou de disette, à l’intérieur même de cette espèce on ne permet la survie que des meilleurs. Par un doux mélange d’eugénisme et d’euthanasie. Le livre noir de l’apiculture ***est désormais à ma portée. Est-ce bien ce que je veux faire ? La pente du business m’y entraîne pourtant.
Je coupe la poire en deux :
Des reines d’élevage, jeunes, sélectionnées, douces et productives, produiront le GreMiel**** sans faire courir de risques au voisinage urbain.
Et au milieu des champs, à la campagne ou j’ai la chance d’avoir un terrain d’accueil, je construirai une EHPAD ou elles iront passer leurs vieux jours, essaimeront si le cœur leur en dit, diversifieront leurs gênes –ou pas- par une reproduction naturelle, produiront –ou pas- du miel ordinaire qui fera mon quotidien, libérant leur éventuelle agressivité sur les bovidés qui seront leurs plus proches voisins.
Qui sait, auront-elles à cœur de me prouver que le bonheur est dans le pré ? Qu’un jour une de leurs descendantes « naturelles » fera mieux que ses consœurs à génétique contrôlée dans des îles ou les éleveurs empêchent le croisement intempestif ? On n’est jamais à l’abri d’un miracle de la nature.
* Eh oui, la demande excède l’offre
** Mais comment en suis je arrivé là ?
*** Ou plutôt de l’agriculture
**** GreMiel ?